IRSST - Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail

Les travailleurs immigrants et la SST

  •   07 février 2014

L’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail (IRSST) publie les résultats d’une étude portant sur les stratégies de prise en charge de la santé et de la sécurité du travail (SST) dans les petites entreprises qui embauchent une main-d’œuvre immigrante. L’échantillon était constitué de 28 petites entreprises (PE) comptant entre 10 et 50 travailleurs, dont les deux tiers employaient de façon importante des immigrants, et l’autre tiers, le groupe de comparaison, embauchait principalement de travailleurs d’origine canadienne. Les chercheurs ont entre autres réalisé des entrevues auprès des répondants de SST des PE et des professionnels en santé au travail de Centres de santé et de services sociaux, et ont invité les travailleurs à répondre à un questionnaire.

Toutes les PE étudiées disposaient d’un répondant de SST dont les mandats et les compétences variaient énormément d’une entreprise à l’autre. Les trois quarts d’entre elles (78 %) avaient un préventeur représentant de l’employeur, mais l’étude constate que les travailleurs immigrants sont peu formés et informés en matière de prévention et qu’ils ne sont pas partie prenante de la culture de la SST. La recherche a aussi permis de déterminer que les réseaux ethniques se transforment en levier d’insertion économique des immigrants. Ceux-ci occupent des emplois pour lesquels ils ne sont pas qualifiés et ils les occupent beaucoup plus longtemps qu’ils ne l’auraient eux-mêmes cru, ce qui crée une certaine homogénéité des origines ethniques dans plus de la moitié des PE étudiées. « Dans 15 entreprises sur 28, une part importante de la main-d’œuvre, autant chez les dirigeants, les superviseurs que les travailleurs, est non seulement immigrante, mais elle provient des mêmes pays d’origine. Ce caractère est très important à considérer. Il est un indicateur des liens sociaux qui unissent les travailleurs au sein de l’entreprise, mais il influence aussi la dynamique de prise en charge et la participation des travailleurs immigrants aux mesures de SST », explique la chercheuse Sylvie Gravel, auteure principale de l’étude.

Fait inattendu, les PE qui embauchent de façon importante des travailleurs immigrants sont dotées de comités de SST. Ceux-ci fonctionnent depuis peu de temps et sont souvent non paritaires en raison de la conception plus « paternaliste » de la SST des dirigeants et des superviseurs qui se reflète dans la composition des comités de santé et de sécurité où l’on retrouve essentiellement des gestionnaires. « Les travailleurs immigrants accordent davantage d’importance à la manifestation de leur loyauté envers un employeur qui leur a permis de s’insérer dans le marché du travail qu’à l’adoption de comportements critiques envers leur environnement de travail. Il faut donc mettre en place des leviers leur permettant d’exercer leur droit puisque, souvent, ils ne savent pas qu’ils ont droit à l’indemnisation en cas d’accident et à la réintégration au travail après convalescence, qu’ils peuvent refuser d’exécuter une tâche jugée dangereuse, que la travailleuse enceinte peut être réaffectée si des contaminants l’exposent à des dangers, etc. », précise Mme Gravel.

L’étude évoque quatre pistes pouvant expliquer la faible contribution des travailleurs immigrants aux diverses mesures de SST et sur lesquelles des efforts pourraient être investis, soit la formation, l’initiation à la tâche, la participation au comité de SST, ou encore la collaboration aux enquêtes d’accident.

Les résultats de cette recherche peuvent être consultés sans frais à http://www.irsst.qc.ca/media/documents/PubIRSST/R-793.pdf.

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Source
Jacques Millette
Responsable des affaires publiques
IRSST