IRSST - Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail

Étude des qualités psychométriques de l’Outil d’identification de la situation de handicap au travail (OISHT) utilisé auprès de travailleurs ayant un trouble musculosquelettique ou un trouble mental courant

Résumé

L’outil d’identification de la situation de handicap au travail (OISHT) consiste en une entrevue structurée qui a été développée pour aider les cliniciens à identifier de façon systématique les facteurs liés à l’incapacité au travail. L’OISHT est un des rares outils disponibles en réadaptation pour la clientèle en phase chronique d’incapacité au travail. Il tient compte de l’influence de différents systèmes (personnel, santé, travail, indemnisation) et a été élaboré pour les deux principales problématiques de santé associées à l’incapacité au travail, soit les troubles musculosquelettiques (TMS) et les troubles mentaux courants (TMC).

L’objectif de cette étude visait la validation de l’OISHT auprès de personnes absentes du travail, en raison de TMS ou de TMC. Plus précisément, il s’agissait de décrire les qualités psychométriques suivantes de l’OISHT : 1) la validité de construit, 2) la cohérence interne, 3) la fidélité interjuges et 4) la validité convergente.

Un devis corrélationnel transversal a été utilisé avec un échantillonnage non probabiliste. Les critères d’inclusion des ergothérapeutes pour participer étaient : 1) être membres de l’Ordre des ergothérapeutes du Québec; 2) avoir au moins une année d’expérience en réadaptation au travail; 3) avoir suivi la formation spécifique pour utiliser l’OISHT (durée moyenne de 4 heures). Quant aux travailleurs ayant participé, ils devaient : 1) être absent du travail en raison d’un TMS ou TMC depuis au moins trois mois, mais moins de deux ans; 2) avoir un lien d’emploi et 3) être admis dans un programme de réadaptation. L’administration de l’OISHT durait entre 90 et 120 minutes. De plus, pour l’évaluation de la validité convergente, les participants ont rempli des questionnaires autoadministrés mesurant différents concepts associés. Aussi, pour un sous-groupe de participants de chaque population, des ergothérapeutes ont complété, entre 24 et 72 heures après l’utilisation de l’OISHT, un Inventaire des causes du maintien de l’incapacité au travail (n = 72 pour la version TMS et n = 65 pour TMC). Finalement, six ergothérapeutes ont coté l’OISHT à partir d’histoires de cas standardisés afin d’évaluer la fidélité interjuges pour chaque population à l’étude.

Au total, 35 ergothérapeutes ont participé à l’évaluation de 290 participants, soit 140 personnes avec TMS et 150 avec TMC. Pour la validité de construit, une analyse factorielle exploratoire (AFE) a permis de dégager des dimensions semblables au sein des deux versions, c’est-à-dire la représentation de la maladie, le jugement clinique en regard de la sévérité de la condition médicale et le niveau d’exigences élevées du travail. Cette analyse a permis de réduire d’environ 20 à 40 % le nombre d’items, selon les versions. Cependant, les résultats variables pour la cohérence interne de certaines dimensions, issues de l’AFE, suggèrent certaines réserves, principalement pour la version pour la population présentant des TMC. Quant à la fidélité interjuges, elle est satisfaisante en regard de la nature de l’outil, qui est une entrevue structurée. Enfin, en l’absence de mesure étalon, la validité convergente reste à confirmer.

En somme, malgré les limites rapportées, il s’avère que le contenu de l’OISHT, en réduisant le nombre d’items proposés, correspond bien aux écrits scientifiques actuels sur les populations à l’étude et s’inscrit dans une compréhension biopsychosociale de la personne en incapacité de travail. Toutefois, la version pour la population de personnes présentant des TMC demande à être révisée et testée à nouveau.