IRSST - Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail

Pertinence et conditions d'utilisation des indices thermiques dans le contexte québécois

Résumé

Cette étude s’intéresse à l’ensemble des contraintes thermiques, depuis les grands froids typiques du nord du Québec, jusqu’aux ambiances excessivement chaudes retrouvées dans certaines industries. Six indices thermiques ont été analysés en détail; trois d’entre eux s’appliquent au froid, un au confort thermique et deux visent les conditions excessivement chaudes.

La revue de la documentation scientifique concernant l’exposition au froid révèle que, bien que de moindre importance que l’adaptation comportementale, l’adaptation phénotypique aussi bien que génotypique est observée chez les personnes exposées aux ambiances froides. L’ensemble de tous ces ajustements physiologiques, que l’on nomme acclimatation, influence significativement les réponses physiologiques mesurées en termes de dextérité, de puissance, de capacité d’apprentissage et de mémorisation, de temps de réponse et de mémoire de travail. Les personnes non acclimatées ont une performance et une vigilance moindres et peuvent donc être plus à risque lorsqu’elles sont exposées au grand froid. Il importe donc de considérer et de reconnaitre la provenance, de même que l’historique récent de travail au froid des personnes qui ont à affronter ces situations particulières.

Malgré ce qui précède, l’adaptation comportementale, qui s’acquiert en quelques expositions au froid, est plus importante. Il devient ainsi prioritaire d’insister sur la formation des personnes et sur les moyens de protection tels que les abris chauffés et les vêtements dans un programme de gestion de l’exposition au froid. Quoiqu’il en soit, l’ensemble de la documentation révèle qu’un programme de surveillance est pleinement justifié, spécialement pour ces situations où des gens non acclimatés et non accoutumés se trouvent exposés.

Trois indices concernant l’exposition au froid ont été étudiés à savoir : Saskatchewan, Isolement requis (Ireq) et refroidissement éolien. L’Ireq n’a pas été retenu parce que les valeurs d’isolement des vêtements, strictement nécessaire à son utilisation, ne sont pas disponibles. Aussi, son application exigerait de limiter quelques paramètres à l’intérieur de balises qui ne sont pas définies à ce jour. Malgré qu’il se trouve dans les publications de plusieurs grands organismes depuis trois décennies, la base scientifique de l’indice Saskatchewan n’a pu être retracée et cela inquiète. À l’opposé, le refroidissement éolien est bien connu des milieux intéressés et fort bien documenté. Plutôt vague quant aux mesures de prévention, il faudra considérer enrichir cet indice de recommandations plus précises pour en faire un véritable outil de prévention.

L’indice du Vote moyen prédit et du Pourcentage prédit d’insatisfaits (PMV-PPD) concerne le confort thermique et fait le pont entre les conditions de froid et de chaleur. Son application s’adresse typiquement aux espaces intérieurs et requiert une instrumentation spécialisée, notamment la lecture de la température de globe noir (Tg). Ce document définit cependant quelques conditions précises où il est possible de contourner la lecture de Tg sans perte de précision. Les responsables en climatisation/chauffage des espaces intérieurs aussi bien que les hygiénistes trouveront un intérêt pour cette norme qui permet d’estimer le pourcentage de personnes insatisfaites de l’environnement thermique.

Finalement, pour les environnements thermiques excessivement chauds (WBGT au-dessus de 32 °C), l’étude retient l’utilisation de la norme PHS : ISO 7933. Le domaine d’application de cette norme, dans sa version actuelle, ne dépasse pas 39,8 °C-WBGT, mais son extension jusqu’à des valeurs dépassant 45 °C se montre cohérente si deux modifications y sont apportées. L’une concerne la sudation maximale des sujets non acclimatés, l’autre la dissipation de la chaleur accumulée. Ces deux modifications corrigent des erreurs méthodologiques déjà présentes dans son champ d’application actuel. La Short-Term Exposure Limit proposée en 2009 n’a pas été retenue parce qu’elle montrait des incohérences manifestes et que la documentation scientifique n’a pas validé cette approche.

Des observations sur le terrain ont permis de définir les instruments et approches nécessaires à l’utilisation de tous les indices retenus, depuis les grands froids jusqu’aux ambiances excessivement chaudes. Les limites d’interprétation et d’application sont également définies pour chacune.

Informations complémentaires

Catégorie : Rapport de recherche
Auteur(s) :
  • Pierre C. Dessureault
  • Pierre Oupin
  • Michaël Bourassa
Projet de recherche : 0099-8920
Champ de recherche : Projets spéciaux
Mis en ligne le : 26 juin 2014
Format : Texte