IRSST - Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail

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Introduction

La silice (SiO2) peut exister sous forme cristalline ou sous forme amorphe. Lorsque la silice est cristalline, elle peut se présenter sous plusieurs formes (polymorphes : même formule chimique mais structure cristalline différente). Le quartz (#CAS : 14808-60-7), la forme cristalline la plus abondante naturellement, se retrouve dans différents procédés miniers. Il est largement utilisé en industrie en raison de ses propriétés physico-chimiques intéressantes. Plusieurs milliers de travailleurs québécois sont potentiellement exposés au quartz dans différents domaines d'activités: les mines, les carrières et sablières, le traitement des minerais, le creusage de tunnel, la coupe de pierre et le polissage, la maçonnerie, les fonderies, le sablage au jet, les abrasifs, la céramique, les manufactures de verre et les pigments. La cristobalite (#CAS : 14464-46-1), quoique relativement rare naturellement et industriellement, est la deuxième forme de silice cristalline la plus rencontrée. Elle provient, par exemple, de l'altération à la chaleur des fibres réfractaires céramiques. La tridymite (#CAS : 15468-32-3), le troisième polymorphe réglementé de la silice cristalline, est pratiquement inexistante à l'état naturel et très peu ou pas documentée dans la littérature qui traite d'hygiène industrielle.

Effets de l'exposition à la silice cristalline sur la santé

Une exposition à l'un ou l'autre des polymorphes de la silice cristalline peut occasionner une fibrose chronique, la silicose, qui peut ne se manifester que dix ans et plus après l'exposition à des concentrations relativement basses. Une silicose accélérée, résultant de l'exposition à des concentrations élevées de silice cristalline peut se développer après des expositions initiales de cinq à dix ans. Enfin des silicoses aiguës peuvent se produire après une exposition allant de quelques mois à quatre ou cinq ans à des concentrations très élevées; elles sont observées principalement chez les travailleurs du jet de sable.

La relation entre l'exposition professionnelle à la poussière de silice cristalline et la silicose est bien établie. Des études ont démontré que les silicotiques avaient un pronostic vital diminué et étaient à plus grand risque de développer un cancer du poumon. Depuis 1997, la silice, sous la forme de quartz ou de cristobalite provenant du milieu de travail, est citée dans la liste du CIRC (Centre international de recherche sur le cancer) des composés considérés comme cancérogènes chez l'humain (substance du groupe 1). Des organismes de différents pays ont mis la silice sur leur liste de contaminants nécessitant une action prioritaire. La situation québécoise est constante depuis plusieurs années avec trente à quarante nouveaux cas de travailleurs diagnostiqués et compensés pour silicose à chaque année.

Valeurs d'exposition moyenne pondérée (VEMP)

La valeur d'exposition moyenne pondérée pour le quartz est de 0,1 mg/m3 tandis que les VEMP pour la cristobalite et la tridymite sont à la demie de la norme du quartz, soit 0,05 mg/m3. Dans la dernière révision du "2000 TLVs(r) and BEIs(r) " de l'ACGIH (American Conference of Governmental Industrial Hygienists), le "Threshold Limit Value" (TLV(r)) pour le quartz a été diminué à 0,05 mg/m3.

Stratégie et conditions d'échantillonnage

Plusieurs étapes doivent être suivies afin de faciliter l'interprétation des résultats analytiques pour la surveillance environnementale de la silice cristalline. En premier lieu, il est important de connaître la nature des produits présents dans l'industrie et susceptibles d'être retrouvés dans les poussières aéroportées afin de s'assurer qu'il n'y ait pas d'interférences. Si la composition de la poussière n'est pas connue, une analyse qualitative d'échantillons de procédé ou de poussières déposées (analyse de composition de poussière par diffractométrie des rayons X ou par microscopie à lumière polarisée) devra être réalisée afin de vérifier la présence et l'importance des polymorphes de la silice et de déterminer la méthode analytique permettant la quantification de la silice dans les poussières aéroportées selon les interférences identifiées.

L'échantillonnage de silice cristalline respirable doit être effectué à l'aide d'un instrument donnant une séparation granulométrique répondant aux spécifications du Guide d'échantillonnage des contaminants de l'air en milieu de travail de l'IRSST (2000), tel un cyclone Dorr-Oliver opéré dans les conditions optimales, soit à un débit réel de 1,7 L/min. Ce guide recommande un volume minimal de 800 L pour le prélèvement du quartz et de 1000 L pour la cristobalite ou la tridymite. En utilisant un filtre à membrane de chlorure de polyvinyle (CPV) de 37 mm, l'échantillon pourra être analysé indifféremment par la méthode IRSST 206-2 (diffractométrie des rayons X) ou par la méthode IRSST 78-1 (spectrophotométrie infrarouge), après calcination de la membrane et redéposition uniforme de la poussière par filtration sur une autre membrane (argent ou CPV). Ces deux méthodes ont aussi l'avantage de permettre une combinaison de plus d'une membrane si la quantité de poussières ou de silice est insuffisante. La méthode IRSST 56-3 (méthode directe) n'est plus utilisée en raison d'un dépôt non uniforme de la poussière, de la difficulté à obtenir une quantité suffisante de poussières et de l'impossibilité de combiner les membranes.

Pour de faibles concentrations de poussières, spécialement lorsque la teneur en silice est élevée, la poussière respirable peut être estimée directement à partir des mesures gravimétriques d'échantillons d'air selon la méthode IRSST 48-1 et le résultat est comparé à la valeur d'exposition moyenne pondérée de 0,1 mg/m3 pour le quartz ou de 0,05 mg/m3 pour la cristobalite ou la tridymite. Évidemment si la concentration retrouvée selon cette méthode s'avérait supérieure à la VEMP, une analyse spécifique devra alors être réalisée pour confirmer la concentration de silice cristalline.

Conclusion

L'identification des postes de travail à risque, le contrôle des sources d'exposition et la surveillance environnementale périodique afin de s'assurer que les niveaux d'exposition soient inférieurs aux valeurs d'exposition admissibles recommandées sont des facteurs pouvant favoriser la prévention de la silicose.

L'échantillonnage et l'analyse de la silice cristalline sont particulièrement complexes compte tenu des nombreux paramètres pouvant diminuer la précision des méthodes analytiques disponibles. L'étalonnage approprié du système pompe-cassette-cyclone, la représentativité de l'échantil-lonnage, le choix judicieux d'une technique d'analyse qui tient compte des interférences ainsi que la collecte de quantités optimales de silice et de poussières sur le filtre constituent des facteurs pouvant augmenter la justesse et la fiabilité des méthodes de surveillance environnementale de la silice cristalline.

Chantale Dion, Ph.D., chimiste
Programme Hygiène et toxicologie

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